samedi 29 décembre 2012

En deçà des promesses / 7



Dans ce billet, quatre termes relatifs à l’hiver et leur traitement dans le Dictionnaire de la langue française, le français vu du Québec, le Franqus.

Pelleter

Selon le Franqus, le verbe se conjugue je pellette ou, suivant les rectifications orthographiques, je pellète. Le Franqus se contente d’indiquer que l’infinitif présent se prononce [pɛlte] et s’abstient de dire comment prononcer le verbe aux autres temps et aux autres modes. Il se montre ainsi plus prudent que l’Office québécois de la langue française dont la Banque de dépannage linguistique nous dit : « Nous entérinons donc la prononciation [pElt] (pèlt), même dans un registre soigné, tout en conservant la graphie je pellette, tu pellettes, ou, selon les rectifications orthographiques, je pellète, tu pellètes, etc. »


Charrue

Le Franqus ne donne pas l’UQ [= usage québécois] charrue (ou charrue à neige, de l’anglais snow plough) au sens de « chasse-neige ». Contrairement à l’Office québécois de la langue française et à son Grand Dictionnaire terminologique. Voir mes billets « Mettre la charrue devant les bœufs ou devant les congères ? » et « La charrue devant la congère ». Il est tout de même curieux qu’un dictionnaire dit de langue ne relève pas cet usage et qu’on le trouve dans un dictionnaire terminologique où il n’a pas sa place.


Gratte

Le Franqus a l’UQ [usage québécois] fam. gratte = « chasse-neige ». Le Grand Dictionnaire terminologique de l’Office québécois de la langue française place le mot dans les termes « à usage restreint » et y ajoute la marque « langue courante ». Comme je l’ai fait valoir à plusieurs reprises, pourquoi un dictionnaire terminologique se mêle-t-il de la langue courante ? En revanche, il est normal qu’un dictionnaire de langue comme le Franqus relève cet usage.



Glace noire

Voici la définition que donne le Franqus : « mince film de glace transparente, presque invisible sur la chaussée ou ailleurs ».


Il est difficile de voir en quoi la définition du Franqus diffère substantiellement de la définition de verglas donnée par le Larousse en ligne, les deux dictionnaires s’accordant pour dire qu’il s’agit d’une couche de glace mince et transparente (il est vrai que le Franqus utilise film plutôt que couche…) :

  • Couche de glace mince et transparente, qui se forme à la surface du sol ou des objets, lorsque de grosses gouttes de pluie en surfusion se congèlent brusquement à leur contact.
  • Couche de glace lisse constituée par une pluie non surfondue tombant sur un sol glacé ; couche rugueuse et glissante par endroits, qui se forme lorsque la neige au sol, après avoir fondu, se congèle de nouveau.


Le Franqus ne donne aucune marque d’usage autre que « UQ » à glace noire même s’il indique que le terme vient de l’anglais black ice. En cela, il suit le Grand Dictionnaire terminologique de l’Office québécois de la langue français, qui justifie glace noire en écrivant qu’il est « bien construit » (l’endogénisme flirte avec l’eugénisme linguistique en suggérant d’expédier dans les limbes les termes mal formés). J’aimerais bien qu’on me donne un seul exemple de calque « mal construit ».

Notons que l’usage du mot film dans la définition ne correspond pas aux définitions de ce mot dans le même Franqus : 1) pellicule photographique ; 2) œuvre cinématographique ; 3) déroulement ininterrompu d’événements. D’habitude, on s’arrange pour que les mots utilisés dans les définitions d’un dictionnaire soient définis dans le même dictionnaire… A-t-on même pensé qu’il pouvait s’agir d’un emprunt sémantique à l’anglais ? Voici en effet la définition que donne de film le Webster : « a thin covering or coating <a film of ice> ».

À suivre

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